Overblog
Editer l'article Suivre ce blog Administration + Créer mon blog
20 mai 2020 3 20 /05 /mai /2020 16:45

À ce jour, trois diocèses français n'ont pas un évêque à leur tête : Lyon depuis mars, Nantes et Saint-Claude (Jura) depuis novembre. Dans cinq autres - Saint-Denis de la Réunion, Nouméa, Nancy, Auch et Bayeux-Lisieux -, les titulaires ont passé l'âge de 75 ans. Leur lettre de démission est arrivée depuis longtemps à Rome, sans qu'ils ne voient arriver la quille.

 

Gilbert Aubry, prélat de la Réunion, vient de souffler 78 bougies ! Le même âge que Michel Dubost, toujours bon pied, bon œil, mais qui a sans doute envie de quitter l'intérim baroque d'administrateur apostolique à Lyon, qu'il assure depuis juin 2019.

 

Histoire de compléter le tableau, deux évêques vont arriver au bout de leur mission fin 2020 et ils ne seront pas moins de 8 à faire de même l'année prochaine.

 

Que fait donc le nonce, dont la préparation de ces nominations est une des missions principales ? Pour sa défense, on pourra avancer que Mgr Celestino Migliore (voir son brillant parcours ici) n'a été nommé à Paris que le 11 janvier. Il a été appelé pour succéder au sulfureux Luigi Ventura, mis en cause pour avoir les mains baladeuses sur les garçons, réfugié à Rome avant même d'être relevé de ses fonctions officiellement pour raison d'âge (1). On ajoutera que la crise du Covid a bouleversé sans doute la nonciature, comme pas mal d'administrations.

 

Mais quand même. En janvier dernier, le cardinal Marc Ouellet, préfet de la Congrégation vaticane pour les évêques, avouait ce qui se dit sous cape depuis longtemps. Dans une interview à la revue espagnole Vida nueva, il concédait la hausse du nombre de prêtres réfractaires à l'épiscopat. « Quand je suis arrivé ici il y a près d’une décennie, un sur dix n’acceptait pas. Maintenant, c’est trois sur dix ». Et le cardinal québécois de détailler les raisons d'un tel refus : « C’est peut-être parce qu’ils ne se sentent pas capables, qu’ils manquent de foi, qu’ils ont des difficultés dans leur vie ou qu’ils préfèrent ne pas courir le risque de nuire à l’Église ».

 

On se permettra d'ajouter un autre motif dans le cadre national : gérer une pénurie permanente de personnel ecclésiastique, dans une institution en crise, ne fait pas nécessairement rêver les candidats. Sans parler de la gestion des crimes sexuels, qui occupe la moitié du temps de certains prélats en place.

 

Dans la même interview (dont on peut lire ici des extraits en français sur le site de l’Église suisse,  le cardinal Ouellet précise ce qu'il attend d'un évêque. « Il ne suffit pas de souligner les vérités de la foi, car la culture a tellement changé au cours des 40 dernières années qu’il faut entrer dans une nouvelle ère du dialogue ». Cette exigence se situe à l'opposé de la disposition d'esprit de la majorité de ceux qui sortent de nos séminaires. Depuis quelques décennies en effet, sont ordonnés des prêtres bardés de certitudes sur la foi chrétienne et la façon de la transmettre. Et ce à leur demande, et souvent au désespoir de leurs formateurs.

 

Que ce profil-là ne soit plus en odeur de nomination à Rome, et donc auprès du nouveau nonce à Paris, représente une bonne nouvelle pour l’Église de France. Mais cette exigence va contraindre certains diocèses à davantage de patience avoir de voir arriver leur nouveau chef. Et le cap des 75 ans ne sera plus synonyme de repos pour les anciens.

 

À moins que le Saint-Siège (qui, je l'ai déjà déploré, ne consulte pas assez ce blog) ne se décide à fusionner certains diocèses. On pense ici à des entités rurales qui comptent un nombre de prêtres faméliques et qui mutualisent déjà des services entre voisins. Cela réduirait le nombre d'oiseaux rares à dénicher.

 

(1) Dans cette affaire, fait rarissime, le Saint-Siège a levé l'immunité diplomatique de son ambassadeur.

 

Partager cet article
Repost0

commentaires

Présentation

  • : Le blog de cathoreve
  • : Philippe Clanché, journaliste religieux, collaborateur de Nouvelle Cité, Témoignage chrétien, Réforme ou La Vie. Au menu : émergence d'un catholicisme ouvert, décoincé et qui puisse parler à notre temps. Bon appétit. On peut me suivre sur Twitter : @pclanche
  • Contact

Recherche

Liens