Cathorêve est de retour après un silence dû à une activité forte de son animateur. Alors pour me faire pardonner, voici de bonnes nouvelles de la galaxie catho française.
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À Lourdes il y a quelques jours, les évêques favorables à la transparence sur le drame de la pédophilie ont gagné la bataille contre leurs collègues adeptes du lavage du linge sale en famille.
Parmi les premiers, on peut citer Mgr Marc Stenger, évêque de Troyes, très lucide quand ceux de sa génération (les septuagénaires) n'ont pas brillé dans ces dossiers : « C'est en faisant la lumière que l'on protège l'institution » (retrouver ici son interview sur France 3 ). Son collègue Mgr François Jacolin, évêque de Luçon (Vendée), affirme : « Ma conviction profonde, c’est que les choses ne peuvent avancer que dans la reconnaissance de la vérité. Il faut prendre le temps, tout le temps qu’il faut, pour écouter et entendre les victimes, leurs doléances » (interview dans l’Écho de l'Ouest, du 16 novembre).
La décision, un poil forcée par l'opinion, de la création de la fameuse commission indépendante en est la concrétisation. La nomination à sa tête de Jean-Marc Sauvé (voir ici le communiqué de l'épiscopat /), catho plutôt ouvert mais classico-compatible, a fait l'unanimité. Il assure avoir les pleins pouvoirs. Embauché lui-même à titre bénévole, aura-t-il les moyens financiers de sa mission : enquêter, interroger, fouiner dans le passé de certains dossiers putrides dont les acteurs sont souvent décédés ou très âgés, et faire des propositions ?
Espérons cette fois, 18 ans après les premiers « plus jamais ça » lancés à Lourdes.
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À Bordeaux, le cardinal-archevêque Jean-Pierre Ricard a consacré un éditorial de la revue diocésaine aux "fraternités", une idée ambitieuse du récent synode du diocèse (texte à retrouver ici).
Après avoir rappelé le discours officiel sur la primauté du sacrement, Mgr Ricard lance non sans courage : « L’eucharistie n’épuise pas toute la vie ecclésiale. Celle-ci doit aussi offrir des temps de rencontre fraternelle, de prière, d’écoute ensemble de la Parole de Dieu, de soutien et de services mutuels ». Il cite alors une des propositions votées par le synode : « Promouvoir, développer et multiplier des petites communautés fraternelles de voisinage dans chaque paroisse, secteur pastoral… Ces communautés fraternelles sont des groupes diversement constitués et ouverts à tous (quel que soit leur état de vie) d’une dizaine de personnes, se réunissant de préférence à domicile, pour un partage de vie, de la parole de Dieu, ainsi qu’un temps convivial. » C’est peut-être ça aussi le sacrement eucharistique.
Sans être révolutionnaire, cette idée n'est pas vraiment très en vogue dans notre épiscopat, arque bouté sur la messe dominicale. Étant donné les fréquentations romaines du cardinal Ricard, on devine qu'il ne part pas en franc-tireur sur ce dossier sensible et qu'il a l'aval du Saint-Siège.
« Ces petites fraternités sont des lieux d’apprentissage de la vie ecclésiale », note le prélat girondin, qui peut même en parler au présent. « En zone rurale, ces fraternités pourront donner de l’Église un visage proche et familier. Elles montrent que toute vie ecclésiale n’est pas suspendue à la présence du prêtre ».
Et l'archevêque de citer à nouveau le document synodal, lequel suggère que ces fraternités puissent « proposer éventuellement diverses célébrations de la Parole dans les églises, de manière publique et régulière et de créer du lien entre propositions cultuelles et culturelles ». Le retour des anciennes ADAP (assemblée dominicale en l'absence, ou en attente, de prêtres). « Voilà qui peut nous donner des idées pour habiter nos églises ! », lance enthousiaste le pasteur girondin.
Attendons donc la mise en place de ces prometteuses « fraternités » qui nous changent de la culpabilisation de ceux qui ne fréquentent pas le culte dominical. Et restons attentifs à une réaction prévisible de certains prêtres peu enclins à partager ainsi une part de leur pouvoir.
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La troisième bonne nouvelle touche au dialogue entre science et foi. Le Figaro du 8 novembre (voir ici) nous apprend que l'UAI (Union astronomique internationale) vient de demander de rebaptiser la loi ayant révélé à l'humanité le Big bang initial, jusqu'alors appelée Loi de Hubble. Il faudra désormais invoquer la loi de Hubble-Lemaitre, du nom de Georges Lemaître (1894-1966), prêtre belge, enseignant à l'université de Louvain. En 1927, celui-ci a publié un texte fondateur dont le journaliste du Figaro explique la thèse : « si on inverse la trajectoire de toutes les galaxies, et qu'on regarde où elles étaient dans le passé, on obtient une convergence, à un point unique, un état initial de l'univers que Lemaître a décrit comme «la théorie de l'atome primitif », et qu'on appelle aujourd'hui le Big Bang. »
Hélas, la publication de ces travaux dans une revue francophone à faible diffusion diminuera le retentissement de la trouvaille du modeste abbé. Deux ans plus tard, Edwin Hubble publie le texte qui va révolutionner l'astronomie et lui attirer la gloire. Celui-ci a reconnu y avoir songé en rentrant d'un congrès de l'UAI auquel participait le prêtre belge. Ont-ils échangé à ce sujet ?
Cette histoire montre que, depuis longtemps, des hommes de foi et de sciences vivent et pensent avec leur temps et font avancer les connaissances, en conservant la pertinence des récits bibliques de la Création dans un registre uniquement symbolique. La nomination d'un physicien, le père Thierry Magnin, comme futur secrétaire général de la Conférence des évêques de France à compter de juillet 2019, va dans le même sens.